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Syndrome métabolique équin : qu'est-ce que le SME ?

Le SME n’est pas une maladie unique mais un profil de risque qui prédispose surtout à la fourbure d’origine hormonale. Son marqueur central est une dysrégulation de l’insuline : l’organisme produit trop d’insuline au repos ou réagit de façon excessive après l’ingestion de sucres, parfois avec une sensibilité des tissus altérée. On observe souvent une adiposité marquée, notamment une encolure « en crête ». S’y intéresser, c’est prévenir la douleur, la contre-performance et les rechutes de fourbure, en identifiant tôt les chevaux à risque et en objectivant le diagnostic par des tests adaptés.  Synthèse de ce qu'on a pu lire et comprendre du sujet, qui s'apparente à l'obésité et au diabète chez les équidés. 

Qu’est-ce que le syndrome métabolique équin ?

Avant la synthèse écrite, une vidéo de synthèse par une vétérinaire qu'on a trouvé claire.

Le SME n’est pas une « maladie » unique du cheval ou du poney mais un ensemble de facteurs de risque d’une même entité clinique : la laminite (ou fourbure) d’origine endocrinienne. La laminite, couramment appelée foubure, étant une atteinte très douloureuse des lamelles du pied, pouvant entraîner bascule/enfoncement de la phalange.

Son trait central est l’insulino-dysrégulation (ID), terme-parapluie qui englobe :

  • l’hyperinsulinémie au repos, 
  • les réponses exagérées à une charge en sucres
  • et, parfois, une résistance tissulaire à l’insuline.

Des dépôts adipeux régionaux (chignon) et des profils d’adipokines altérés peuvent s’y associer. 
En clair : le SME, c’est un « terrain » hormonal qui favorise la fourbure, surtout quand l’insuline s’emballe ; cou rein gras et réponses anormales au sucre sont des signaux.

Le SME se distingue d’autres endocrinopathies comme la PPID (dysfonction de la pars intermedia), même si les deux affections peuvent coexister. Les recommandations récentes insistent d’ailleurs pour évaluer l’ID chez les chevaux PPID et inversement, afin d’apprécier correctement le risque lié à l’insuline. 
En clair : SME et PPID ne sont pas la même chose, mais peuvent aller de pair ; il faut dépister l’insuline « problématique » dans les deux sens.

Pourquoi s’y intéresser ?

Parce que la laminite demeure une cause majeure de douleur, de contre-performance et de pertes économiques, et que sa forme endocrinienne est très fréquente.

Sur le plan populationnel, le SME est hautement prévalent dans certaines populations (ex. poneys et cobs natifs au Royaume-Uni : prévalence ajustée ~23 %) ; plusieurs facteurs sont modifiables, ce qui en fait un enjeu de santé publique vétérinaire. En clair : la fourbure liée au SME fait mal, coûte cher et toucherait plus particulièrement certaines races.

Au-delà de la prévalence, des cohortes prospectives ont quantifié le risque : chez des poneys non laminiteux suivis en Angleterre, le risque de laminite à 1 an était d’environ 4 % au global, plus élevé lorsque l’insuline basale était augmentée — un signal épidémiologique directement en lien avec l’ID. La récidive après un premier épisode endocrinien reste fréquente (≈34 % sur 2 ans). Ces chiffres expliquent l’intensité des efforts de prévention et de recherche. En clair : plus l’insuline est élevée, plus le risque grimpe ; et une fois touché, le cheval peut rechuter, d’où l’importance d’agir tôt.

Ce que l’on sait du mécanisme du syndrôme métabolique équin

Le pivot physiopathologique est l’hyperinsulinémie.

Des modèles expérimentaux ont montré qu’une hyperinsulinémie prolongée suffit à induire une laminite chez des équidés sains, même sans hyperglycémie — établissant un lien de causalité robuste.

Les travaux récents explorent des voies de signalisation lamellaires activées par l’insuline, notamment via le récepteur de type IGF-1 (et des voies MAPK), ainsi que des altérations vasculaires locales. L’ensemble cadre avec une laminite endocrinienne peu inflammatoire comparée aux formes septiques. PubMed PMC ScienceDirect vetequine.theclinics.com
En clair : trop d’insuline, trop longtemps, peut déclencher la fourbure à lui seul ; cela agit directement sur les tissus du pied.

Ce champ reste actif et nuancé : certaines équipes ont, par exemple, interrogé le rôle du système EGF au sein du pied (résultats mitigés), tandis que d’autres décrivent des remaniements ultra-structurels de la membrane basale lamellaire lors de l’hyperinsulinémie. Une synthèse 2023 recense ces pistes, en soulignant que les modèles expérimentaux et la maladie naturelle ne se superposent pas toujours parfaitement. PLOS ScienceDirect beva.onlinelibrary.wiley.com
En clair : on affine encore la « carte » des mécanismes ; tout n’est pas tranché et les modèles ne reflètent pas toujours la vraie vie.

Diagnostic : où en est-on ?

Sur le terrain, on raisonne en phénotype + biologie. Le phénotype (adiposité générale/régionale, encolure crêtée, antécédents de fourbure) guide la suspicion, puis des tests dynamiques apprécient l’ID : tests oraux (oral sugar test/OST) ou épreuves combinées glucose-insuline, plus informatifs que l’insuline basale isolée. Les lignes directrices (ECEIM, EEG) détaillent les cadres d’interprétation, en rappelant que les seuils dépendent des dosages et que l’époque de l’année peut influencer les réponses à l’OST. PMC beva.onlinelibrary.wiley.com
En clair : on regarde l’allure du cheval puis on « provoque » l’insuline pour mesurer sa réponse : c’est plus parlant qu’une prise de sang unique.

Justement, la saisonnalité a pris de l’importance : chez des chevaux ID, les réponses insuliniques à l’OST tendent à être plus élevées au printemps (et parfois en hiver) qu’en été-automne ; ces variations peuvent faire basculer la catégorisation d’un individu si l’on s’en tient à une mesure unique. Des travaux récents confirment l’intérêt de l’insuline à 60 minutes (T60) comme indicateur de risque futur de laminite. 
En clair : la saison influence la réponse au sucre ; la mesure à 60 minutes est un bon repère pour estimer le risque.

L’état des recherches en 2024–2025

Plusieurs axes se dégagent :

Épidémiologie & génétique. Des études multicentriques affinent la cartographie du risque (rôle du type morphologique « easy-keeper », de l’âge et de l’activité), et des programmes s’intéressent aux déterminants génétiques de la laminite endocrinienne chez les poneys. 
En clair : on cherche qui est le plus à risque et pourquoi, y compris côté héritage génétique.

Biomarqueurs de risque. Des cohortes ont relié des profils d’adiponectine basse et d’insuline élevée à la probabilité ultérieure de laminite ; l’InsulinT60 à l’OST émerge comme un marqueur pragmatique. 
En clair : certaines prises de sang et la fameuse mesure à 60 minutes aident à prévoir la suite.

Physiopathologie fine. L’excès d’insuline agit directement sur les tissus lamellaires (travaux sur IGF-1R et voies associées). Des synthèses récentes mettent en perspective la part vasculaire et les cascades intracellulaires activées dans le pododerme. PMC ScienceDirect beva.onlinelibrary.wiley.com
En clair : on détaille les « fils électriques » dans le pied : récepteurs, vaisseaux, signaux internes.

Microbiome & axes intestin-métabolisme. Des études pilotes suggèrent des associations entre signatures du microbiote, statut insulinique et antécédents de laminite ; ce sont des pistes, encore exploratoires. Frontiers
En clair : l’équilibre des bactéries intestinales pourrait jouer un rôle — c’est encore en exploration.

Pharmacologie. Au-delà des leviers non médicamenteux (hors de propos ici), des travaux cliniques récents explorent des modulateurs de la glycémie/insulinémie, par exemple des inhibiteurs SGLT2 tels que l’ertugliflozine, capables d’abaisser l’insuline basale et post-OST dans de petites séries. Ce champ est actif mais encore en consolidation. beva.onlinelibrary.wiley.com
En clair : des médicaments testés chez l’humain sont à l’étude chez le cheval pour calmer l’insuline, mais c’est encore préliminaire.

Le SME en bref

Le SME cadre aujourd’hui une réalité clinique fréquente : des équidés présentant une insulino-dysrégulation et un risque élevé de laminite. Les bases causales — rôle central de l’hyperinsulinémie démontré expérimentalement — sont solides, tandis que les mécanismes intimes (signalisation lamellaire, vascularisation, dialogue métabolique) continuent d’être précisés. Sur le terrain, le diagnostic mêle phénotype et tests dynamiques, avec une attention croissante à la saisonnalité. La recherche progresse vite, de l’épidémiologie aux biomarqueurs et aux approches pharmacologiques, avec des recommandations vivantes mises à jour régulièrement par les groupes d’experts. 
En clair : le SME est courant, l’insuline en est la clé, le diagnostic se précise et la science avance vite ; les recommandations s’actualisent régulièrement.

Sources principales

  • ECEIM – Consensus statement on equine metabolic syndrome (J Vet Intern Med, 2019). Définitions, phénotype, tests. PMC
  • Carslake et al. – EVJ, 2021 : forte prévalence du SME chez poneys/cobs UK (≈23 %). beva.onlinelibrary.wiley.com
  • Knowles et al. – J Vet Intern Med/EVJ 2022 : risque à 1 an et valeur prédictive de l’InsulinT60. PMC
  • Asplin et al. – Modèle d’hyperinsulinémie induisant la laminite (2007), base causale expérimentale. PubMed
  • Grenager – Vet Clin North Am Equine Pract, 2021 : revue de la laminite endocrinienne (peu inflammatoire). vetequine.theclinics.com
  • Sundra 2024 (EVE) – approche pratique de l’hyperinsulinémie, rappels mécanistiques et tests. beva.onlinelibrary.wiley.com
  • EEG – site et documents 2024 sur l’ID/SME (recommandations actualisées). Equine Endocrinology Group
    de Laat & coll. – travaux sur IGF-1R/EGF et revue mécanistique 2023 (EVJ). PMC PLOS beva.onlinelibrary.wiley.com